Frontières imaginaires
24 février › 30 avril 2017 ◇ Project space
La Fondation Boghossian a comme mission de rapprocher les peuples par le biais de la culture. A ce titre elle présentait Frontières imaginaires, une exposition consacrée à la thématique des frontières réelles ou imaginaires, visibles et invisibles, conçue par Louma Salamé.
C’est en 1648 que se développe la cartographie du monde moderne, à l’occasion du traité de Westphalie. La frontière qui distingue les états y prend deux formes : une ligne dite naturelle, délimitée par la topologie maritime ou terrestre (fleuve, mer, montagne) et une ligne dite artificielle, généralement droite et conçue par l’homme.
C’est à la même époque, en 1656, qu’est rendue célèbre une des premières cartes mentales : une gravure intitulée La carte de Tendre, réalisée par François Chauveau, qui liste des frontières invisibles et imaginaires. Dans un ouvrage intitulé Clélie, celle-ci illustre les différents états de l’amour, sous la forme d’un territoire.
Si c’est historiquement la guerre et les empires coloniaux qui ont fixé la taille et le nombre des nations, le fait est que depuis 1900, le nombre d’états a été multiplié par cinq. Les réalités politiques, historiques, culturelles, confessionnelles, ethniques et linguistiques confortent ou contredisent ces nouvelles frontières.
Cette exposition se développait sur deux volets. Le premier proposait une vision politique de la frontière, en présentant des œuvres d’artistes issus d’horizons infiniment divers mais dont l’inspiration est portée par l’exil et les problématiques identitaires et dont le corpus est résolument politique, à l’instar du néon sans équivoque intitulé Les autres de Mekhitar Garabedian, ou des aquarelles à l’encre de Chine réalisées par Barthélémy Toguo.
Les zones frontalières sont de nos jours sujettes à toutes les craintes. Aussi, pour contrôler l’accès de leur territoire, certains pays clôturent leurs frontières. Dès lors celles-ci sont matérialisées par des murs. La question de la matérialité de la frontière et des souffrances auxquelles s’exposent les migrants et les réfugiés s’incarnent dans les cartes du monde développées par Mona Hatoum.
Le second volet de l’exposition proposait des œuvres représentant des mondes cognitifs, émotifs. L’artiste Grayson Perry réalise dans ses gravures la topologie imaginaire de ses rêves et de ses peurs, à l’instar de la Map of an Englishman, où l’on découvre une mer intitulée Démence, une rivière qui porte le nom d’Ambition et un lac qui s’appelle Conscience. En vis-à-vis, la définition du territoire américain par Öyvind Fahlström ou celle du Silver Canyon par Zhu Rixin sont la représentation de visions très personnelles de territoires existants.
La Fondation a également eu le plaisir de présenter des œuvres in situ réalisées par des artistes en résidence de la Villa : une sculpture interactive qui interroge l’échelle et le plan de la Villa Empain réalisée par Aurélie Godard, une série de fresques rupestres et secrètes qui sont l’invention de Chloé Dugit-Gros, ainsi que l’œuvre de Dong Dawei, qui questionne la frontière de la peinture et de l’œuvre.
« Cette émouvante exposition interroge notre position. »
Le Vif Focus, le 10 mars 2017






